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    Les vampires existent donc depuis la nuit des temps sous diverses formes, toutes aux antipodes de la créature nocturne drapée dans une cape et allant toutes canines dehors. Cette dernière version est le fruit de la rencontre entre un personnage historique trouble, un écrivain talentueux et l'objectif d'une caméra.

    1430. Vlad III Dràculea voit le jour dans la région de Sighisoara, en Transylvanie, au coeur des Carpates. Fils de Vlad II, il est considéré comme un homme sanguinaire et surnommé par ses ennemis « Vlad Tepes » (Vlad l'empaleur en roumain) ou encore « Kaziglu Bey » (le prince empaleur en turc). L'histoire le présente comme un être brutal qui embrochait ses victimes avant de boire leur sang ou de déjeuner devant le spectacle de leur lente agonie.

    S'il n'a jamais été question de vampirisme à son sujet, son appartenance à l'Ordre du Dragon devient une preuve supplémentaire de sa barbarie. Fondé en 1408 par le Saint Empereur Romain Germanique Sigismond de Luxembourg, l'ordre avait pour fonctions principales la protection des intérêts de la chrétienté et la croisade contre les Ottomans. Avec le temps la quête de l'immortalité serait devenue l'occupation principale de l'Ordre, et si le fait est non avéré, la rumeur participe directement à l'édification à la légende vampirique de Vlad l'Empaleur en faisant des membres de l'Ordre des vampires par contumace. Ajoutez à cela le dragon symbole de l'Ordre, le diminutif de Dràculea, « Drakul », qui peut se traduire en roumain par « Dragon » ou « Diable », et vous comprendrez que l'Histoire a fait du prince de Valachie un monstre presque inhumain.

    Néanmoins, il fallait plus qu'une poignée de superstitions pour donner corps au mythe. Après avoir longtemps soutenu Vlad II, Mathias I Corvin le Juste, roi de Hongrie, le fait emprisonner pour d'obscurs motifs politiques. Reste que pour justifier ce retournement de situation, Corvin doit faire passer Vlad pour un indésirable, en particulier aux yeux du pape. Il fait rédiger un portrait par son secrétaire, Janus Pannonius, dans lequel il présente Vlad tel que nous le connaissons depuis. Il est décrit comme violent, agressif, décadent, auteur de toutes les horreurs, bref le document est un monument de désinformation et de propagande étonnant. Au fil des siècles, cette biographie, complétée de poèmes et de contes, connaît un succès grandissant auprès d'une populace à la recherche d'émotions fortes et de récits d'épouvante. C'est sur cette reconnaissance que s'appuie Bram Stoker lorsqu'il entame la rédaction de son roman Dracula, qui devait pérenniser à tout jamais la vie fantasmée de Vlad III jusqu'à en faire LA réalité historique.


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    Si, pour beaucoup, Dracula incarne le père de tous les vampires, l'histoire de ces créatures remonte pourtant aux balbutiements de la civilisation, avant de s'émanciper et de se développer au fil des siècles pour devenir le prédateur raffiné aux canines proéminentes avide de sang frais que tout le monde connaît.


    À en croire le dictionnaire courant, un vampire est « un fantôme sortant la nuit de son tombeau pour aller sucer le sang des vivants ». En 1818, Collin de Plancy en donne une définition plus complète dans les pages de son Dictionnaire infernal : « C'étaient des morts qui sortaient la nuit de leur cimetière pour aller sucer le sang des vivants. La Hongrie, la Pologne, la Moldavie en furent longtemps infestées. [...] Ils peuvent quitter leur cercueil depuis midi jusqu'à minuit. [...] Ils vont la nuit embrasser étroitement leurs parents, leurs amis et leur sucent le sang jusqu'à les exténuer et causer leur mort. [...] Ceux qui ont été sucés par les vampires le deviennent à leur tour » . À noter que Plancy consacre un ouvrage entier au sujet en 1820 sous le titre Histoire des vampires et spectres malfaisants. Reste qu'au fil des siècles le vampire à alimenté de nombreux mythes et tout autant de légendes qui varient selon les pays, les époques et ceux qui en rapportent les exactions.

    (dossier complet extrait de "ciné Film(s) #17, mai/juin 2006)


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    Les premières traces d'êtres buveurs de sang remontent à un dessin ornant un vase préhistorique découvert en Perse. Dans la Grèce antique, les ombres du royaume d'Hadès sont décrites comme friandes du sang des victimes, à tel point qu'en Crête (d'après l'écrivain grec Pausanias), on s'en protège en enfonçant dans la tête de certains morts un clou. Sous l'Empire Romain la loi Jus Pontificum indique que les corps ne doivent pas être abandonnés sans sépulture, laquelle était en plus protégée contre les voleurs et les ennemis. Au XIIème siècle, l'Angleterre pullule de vampires qui y sont brûlés en place publique pour canaliser les peurs populaires. Au XIV ème siècle, nous les retrouvons à l'occasion des épidémies de peste, qui donnent lieu à une traque et une extermination systématique de tous les prétendus caïnites. Le XVème siècle voit l'avènement de Vlad III, voïvode de Valachie et appelé à devenir le fameux compte Dracula. Enfin le XVIIème siècle est marqué par Erzsébet Báthory, plus communément appelée Élisabeth Bathory, aristocrate hongroise qui aurait torturé, mutilé et tué entre 100 et 600 femmes. Elle est arrêtée et emmurée vivante en 1610 et mourra quatre ans plus tard. Son obsession de la vieillesse, à laquelle elle pensait échapper en buvant le sang de ses victimes en fait une vampire aux yeux de tous. Mais ce n'est pas la seule raison de cette croyance, puisqu'elle aurait partagé avec Dracula (bien plus tard évidemment) l'appartenance à une société secrète : l'Ordre du Dragon, élément capital de la construction du mythe moderne.


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